Dons au musée Condé à Chantilly

Fondation La Marck

Restaurations et acquisitions récentes

 

En novembre 2020, le musée Condé nous a proposé par l’intermédiaire du prince Amyn Aga Khan, qui préside les Friends of the Domaine de Chantilly, de prendre en charge la restauration du cabinet des Clouet au château, tapisserie, éclairage et tableaux. Il s’agit d’un ensemble unique de 92 portraits peints par Jean Clouet, son fils François et leurs contemporains.

 

Une convention a donc été signée au début de 2021 et le chantier lancé au cours de l’été. En fin d’année, alors qu’une émission de Secrets d’Histoire consacrée au Grand Condé était en cours de tournage, Stéphane Bern a eu la gentillesse de citer l’engagement de la fondation La Marck avant de prendre un marteau pour aider le tapissier en plein travail ! A Pâques 2022, le chantier était achevé et les tableaux restaurés (ainsi que leurs cadres) à nouveau accrochés.

 

© Musée Condé / Mathieu Deldicque

 

Compte tenu de l’excellence de l’équipe qui nous gratifie de superbes expositions, nous ne nous sommes pas bornés à ce chantier mais leur avons offert en mai 2021 le nécessaire de voyage de la duchesse d’Aumale qui passait en vente chez Coutau-Bégarie. Il s’agit d’un nécessaire de toilette de 27 pièces en cristal avec montures en vermeil, aux armes d’alliance des Orléans et Bourbon-Siciles. Il a été fabriqué par la maison Aucoc, fournisseur de la cour, vers 1850, et est maintenant présenté dans le cabinet de toilette de la duchesse.

 

Photo : Coutau-Bégarie

 

                                                    ⁎

 

Ce don a été suivi en mai 2022 d’une acquisition de grande importance pour le musée Condé : le buste en porcelaine de Chantilly de Louis XV, présenté par Audap le 10 et estimé 40 à 60.000. On sait que le prince de Condé avait commencé des essais de fabrication de porcelaine entre 1725 et 1730, puis construit une manufacture sur un terrain situé en ville (ancienne rue du Japon) et placé à sa tête un chimiste venu de celle de Saint-Cloud, Cicaire Cirou. On y travaillait la porcelaine tendre (sans kaolin) en utilisant des matières premières locales qui ont causé quelques difficultés avant d’arriver à un résultat satisfaisant. Parmi les productions emblématiques de la manufacture : les brindilles bleues sur fond blanc, le style kakiémon et les fonds quadrillés de bleu. A partir de 1735, forte d’un privilège royal, la manufacture s’est lancée dans des pièces de forme virtuoses, comme ce magot barbu qui avait atteint un prix record à la vente Daguerre du 11 mars précédent. Autant dire que nous étions inquiets quand nous avons su qu’un buste de Louis XV en porcelaine blanche, signé CC (Condé Chantilly, Cirou Chantilly ou Cicaire Cirou ?) et daté de 1745, allait passer en vente. Il avait été façonné à partir d’un modèle de Jean-Baptiste II Lemoyne.

 

Photo : Audap & Associés

 

La cuisson de pièces de cette taille (ici 34,5 cms) est un tour de force et l’on n’imagine pas le nombre d’échecs subis. On a d’abord des problèmes de couverte inhérents à la porcelaine tendre, qui risque la dévitrification selon la formule choisie (au plomb, stannifère ou alcaline), et la rapidité de cuisson et de refroidissement. Ici, la couverte est en émail stannifère, ce qui donne à la porcelaine une teinte légèrement crème. Les grosses pièces peuvent aussi éclater si justement on les cuit plus vite pour éviter le premier problème. L’invention du four à trois compartiments de Gérin en 1748 améliorera la situation, mais il n’est pas en service à l’époque où la manufacture réalise le buste du roi.

 

Avant 2022, tous les bustes de Louis XV en Chantilly connus étaient dans des musées américains, à Boston pour un exemplaire identique au nôtre (socle au lion couchant et cartouche rocaille, même signature), à Minneapolis avec un socle aux trophées guerriers, au Getty et à Hartford pour un buste un peu différent, avec un socle aux trophées guerriers et cartouche couronné. On ne craignait donc plus leur concurrence mais les 338.000 euros frais compris du magot passé en mars nous faisaient craindre le pire. A tort, car l’adjudication est restée dans la fourchette d’estimation. Le buste a été installé dans le cabinet des Porcelaines, à quelques encablures du cabinet des Clouet restauré par la fondation.


             

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